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dimanche 24 février 2008

Cinéma, Nue propriété

Par Caroline Grisard

Joachim Lafosse « Nue propriété», 2006.


Joachim Lafosse a la volonté de se rapprocher le plus possible de la réalité. Le côté intimiste et dépouillé de la vie qu’il présente induit les spectateurs à s’identifier aux personnages et à percevoir touts les petits évènements successifs qui influencent leurs relations. Sans en être tout à fait conscient car ils se laissent emporter par l’histoire, ils pensent petit à petit à leurs propres expériences. Toutes ces réflexions personnelles qu’induit le film « Nue propriété » en fait sa richesse.

Premièrement, Joachim Lafosse met en avant l’histoire d’une famille désunie et montre les conflits, les tensions et le déséquilibre qu’elle procure. En ce début de siècle, nombreux sont les spectateurs qui connaissent une situation similaire suite à un divorce. Certaines scènes peuvent alors les aider à analyser l’une ou l’autre dispute qui s’est déjà présentée à eux. En outre, les spectateurs qui ont la chance de ne pas avoir subi les conséquences d’un divorce peuvent se reconnaître dans certains conflits.

De plus, le réalisateur nous propose plusieurs thèmes, plusieurs situations, plusieurs causes qui peuvent provoquer un déséquilibre familial.
Notamment, le fait que les deux grands adolescents ne veulent pas quitter la maison nous rappelle qu’actuellement l’entrée dans la vie adulte se fait de plus en plus tard.
Le fait aussi qu’une mère à besoin de se reconstruire suite à un divorce. Dans le film, ont voit qu’elle n’est pas stable, qu’elle veut profiter de la vie et qu’elle en vient même à mentir à ses enfants. Sa vie de femme empiète grandement sur son rôle de mère.

Ensuite, Joachim Lafosse nous présente des personnages complexes. Délibérément, il ne nous dévoile rien de leur vie en dehors de la propriété et du cocon familial. Il ne cherche même pas à leur construire une personnalité profonde avec des qualités et défauts ou des caractéristiques professionnelles. On ne sait par exemple pas si les deux fils poursuivent des études ou s’ils travaillent. Par conséquent, les spectateurs s’identifient aux personnages mais surtout aux relations qui les lient.

Enfin, les décors du film sont ternes, tristes, froids, glauques, simples … bref une vraie signature de la culture wallonne ! Ces décors extrêmement réalistes et simples permettent aux spectateurs et surtout aux Belges de s’identifier davantage par rapport à la fiction.


Pour conclure, ce film est très intéressant et fort interpellant car il est un réel témoignage des rapports humains dans un cadre familial.

Par Baptiste Carolus

de Joachim Lafosse avec Jérémie Rénier, Yannick Rénier, Kris Cuppens, Raphaëlle Lubansu, Isabelle Huppert(...)

François et Thierry, deux frères jumeaux incapables de se séparer de leur mère, Pascale, vivent avec elle dans leur ferme de la campagne belge. Pascale rêve de partir loin avec son voisin et amant, Jan, un cuisinier flamand. Du coup, elle veut vendre la maison. Mais, quand on a deux grands fils avec lesquels on a tissé des liens très serrés, il est difficile de les dénouer quand on veut reprendre sa liberté. Thierry et François réalisent qu`ils vont devoir vivre leur vie d`adulte. Leur relation fusionnelle va alors se transformer en guerre fratricide sous les yeux impuissants de leur mère sous pression, qui quitte la maison sans laisser de traces.
Comme expliqué dans cette introduction, Joachim Lafosse nous conte l’histoire d’une famille déstructurée par la quasi-absence d’un père et par l’incompétence d’une mère à gérer sa vie de couple et sa vie de famille. Quand aux deux frères, ils n’arrivent pas à couper le cordon ombilical avec leur mère .Tout ces problèmes laissent tout au long du film une atmosphère pesante où la trame principale de ce huis-clos est prenante bien qu’elle soit monotone et répétitive.
La tension est capturée jusqu’à la fin et au-delà par les brefs plans séquences. Les plans sont non-suivis et il y a un jeu de caméra-épaule et de plans fixes ce qui laisse le spectateur à distance par rapport à la scène. Le seul gros plan du film se trouve à la fin, après que Thierry aie blessé son frère dans le salon. Celui-ci se sauve dans les bois aux alentours sous le choc de ce qui vient de ce passer. L’absence de musique laisse place aux émotions que les acteurs font passer. C’est seulement à la fin du film que l’on peut entendre une musique, lorsque l’on voit la voiture s’en aller, laissant cette nue propriété seule au beau milieu des bois.
Cette histoire familiale peut toucher le spectateur même si celui-ci est mis à distance car elle peut arriver à tout le monde. Le film pose une réflexion sur les conditions et les valeurs familiales, sur les relations que l’on peut avoir avec ses enfants, son mari ou son amant. Joachim Lafosse nous montre grâce à son film les dégâts d’un amour filial étouffant.


Une famille mise à nu

Une simple histoire de vie traitée avec finesse. Voilà peut-être la définition que l’on pourrait donner de « Nue propriété ». La famille est quelque chose de très important dans la vie du réalisateur, Joachim Lafosse, et c’est donc pour cela qu’il a décidé de mettre en scène un conflit familial. Ce film est à la fois d’une simplicité et d’une complexité incroyables. Le moindre détail a un sens, rien n’est laissé au hasard.

Tout d’abord, les thèmes que ce film aborde ne sont pas très positifs. Mais ce n’est pas pour autant que l’on a le moral à zéro après avoir vu « Nue propriété ». Sont abordés par exemple la jalousie (d’un frère envers l’autre), les souvenirs (la difficulté de lâcher la passé), la mort (de François), la violence (les batailles des deux frères), l’ambigüité (la relation entre Thierry et sa mère), la rivalité (entre Thierry et François), la tricherie, les tensions mais aussi la passion et les relations sexuelles, perturbées par l’ambiance familiale. Mais aucun de ces thèmes n’est là pour « faire joli ». Tous ont un sens.

Ensuite, chaque endroit, chaque geste, chaque détail est réfléchi et rempli de sens. Comme par exemple quand les garçons jouent au ping-pong, cela symbolise leur côté enfant, celui qu’ils ne veulent pas quitter. La maison, elle, représente l’enfance, le passé, les souvenirs. La salle de bain, quant à elle, est un lieu de relation particulière entre la mère et ses deux fils : les deux frères dans le même bain, la mère qui se lave devant Thierry, etc. Tous les moindres faits et gestes des personnages sont donc à analyser au peigne fin.

De plus, les techniques adoptées pour réaliser ce film sont très représentatives du cinéma d’auteur et du cinéma belge. Les plans sont très longs, pas de champ contre champ, beaucoup de hors champ,… Mais aussi une lumière blanche, aucune couleur chaude, les seuls sons étaient ceux des voix et des bruits alentours. Il n’y avait aucune musique durant le film, excepté à la fin, quand Thierry et sa mère s’en vont. C’est ici que l’on peut également retrouver la simplicité du film. Le but de Joachim Lafosse n’est pas de rentrer dans les règles, mais de créer les siennes.

Par ailleurs, ce film est celui d’un grand réalisateur, un film d’auteur. La réalisation est faite de telle sorte qu’il nous est impossible de rentrer dans le film. Il y a une distanciation volontaire par rapport au spectateur, qui donne une autre saveur au film. Joachim Lafosse n’a pas réalisé « Nue propriété » pour que le spectateur se détende, et s’identifie sans effort aux personnages ; mais plutôt pour qu’il voit le film, qu’il soit acteur par la réflexion et le changement de mentalité que le film pourrait lui apporter.

Les personnages de « Nue propriété » sont très recherchés et joués sans exagération. Les acteurs nous donnent vraiment l’impression qu’ils jouent leur propre vie. Les relations entre les personnages sont très ambigües (comme la relation entre François et sa maman). Les deux frères, malgré qu’ils soient jumeaux, sont très différents de par leur caractère. L’un est doux et compréhensif et l’autre est plus violent et agressif. Ils sont complémentaires, mais aussi très éloignés l’un de l’autre. Tous les personnages de ce film (même s’ils ne sont pas nombreux) sont très vrais et joués avec beaucoup d’authenticité.

En conclusion, ce film est une réussite sur tous les plans. J. Lafosse a pu faire émerger un maximum de sens avec un minimum d’effets. C’est par là que l’on reconnaît les grands réalisateurs. Un chef d’œuvre qui remet en question toutes nos petites habitudes. Un film à méditer, mais surtout à comprendre.


Par Audrey Saenen

Une propriété dénudée de joie


Film belge de Joachim Lafosse, sorti en 2007, raconte l’histoire de Pascale et de ses fils jumeaux. Tout dévie quand Pascale entreprend l’idée de vendre sa maison pour diriger une maison d’hôtes. Diplômé de l’IAD (instituts des arts de diffusion), Joachim Lafosse arrive avec un petit budget à faire un film extraordinaire, très réel car en partie autobiographique.


Ce film est authentiquement belge. C’est un film très réel, la preuve étant que Joachim Lafosse, a lui-même connu la gémellité et ce sentiment de pouvoir empêcher sa mère de vivre. Tous jumeaux ou même mère pourrait se reconnaître dans ce film, les personnages ne sont pas caricaturés ni idéalisés. C’est une famille dont les parents sont divorcés (situation tout à fait normale à notre époque), avec des problèmes d’argent, un petit travail, le fils qui se rebelle, qui s’avachit devant la télé, une maison modeste mais pourtant avec une grande valeur sentimentale car elle appartient à leur père qui lui a recommencé sa vie avec une autre femme mais qui continue de rendre visite à ses enfants. Situations tout à fait possibles. Les personnages ont des accents, des répliques parfois pas terrible telles que l’on pourrait dire et non pas des « lorsque le soleil se lève sur ta peau » etc etc.

C’est un film touchant. La mère est attachante même si des fois incompréhensible, Thierry est un peu incompréhensible, il s’énerve pour un rien, François est calme et aimant, le père a l’air d’avoir reconstruit sa vie mais a l’air d’avoir encore de l’attention envers son ex-femme. Les personnages s’engueulent, se quittent, se réconcilient, ont peur et la fin est plutôt inquiétante, elle nous laisse sur notre faim. On sent l’émotion quand Thierry appelle sa mère, beaucoup de colère tout au long du film mais surtout d’amour entre ces trois personnes.

Un film qui prête à la réflexion. On se pose beaucoup de questions, il n’y a presque pas de musique, ce qui fait qu’on ne s’intègre pas au personnage mais qu’on réfléchit en restant nous-même.


C’est une histoire qui n’est pas cousue de fil blanc avec des personnages simples, réels dans un milieu modeste. Un film tout à fait facile à comprendre, à imaginer, sans happy end (que du contraire), qui prête à réflexion et émouvant. Verserez-vous des larmes devant cette famille brisée à cause d’une maison, d’un projet, d’un rêve ?


Par Aline Vanherck

La simple réalité à 3.


Nue propriété de Joachim Lafosse est un film qui nous emmène dans un drame familial entre une mère et ses deux fils. Ce film typiquement belge fait preuve d’un grand réalisme. Les thèmes sont recherchés, ils nous font réfléchir sur la réalité de la vie, et plus particulièrement
sur le conflit familial. Et les personnages sont d’autant plus vrais.

Tout d’abord, un point négatif que l’on pourrait aborder ici c’est la caméra épaule. En effet, un film de 1h30 tourné en caméra épaule présente de nombreux aspects négatifs. Cela peut très vite lasser et fatiguer le spectateur. Il faut sans cesse se concentrer pour suivre le fil conducteur. Il est vrai, cependant, que ce film ne présente pas énormément d’actions mais même lorsque les acteurs sont immobiles on sent toujours que la caméra est en léger mouvement.

Ensuite, « Nue propriété » est sans aucun doute un très bon film sur de nombreux aspects. L’intrigue est très réaliste, c’est en effet une situation qui pourrait arriver à beaucoup de monde, c’est un fait de la vie réelle. De plus, il nous laisse sur notre fin et ne nous développe pas une jolie petite « happy end » hollywoodienne. Malgré le petit budget que ce film affiche, il est utilisé de manière efficace. En outre, plusieurs films de Joachim Lafosse ont déjà reçu quelque prix comme « Tribu » ou encore « Ca rend heureux ».

En sus, les thèmes abordés dans ce film font preuve d’une grande diversité et d’une grande recherche. En effet ce sont des thèmes qui nous font réfléchir. Ils font tous partie de la vie actuelle de « monsieur tout le monde ». Par exemple : l’abandon, la jalousie, les discussions douloureuses, la rivalité, les relations mère/ fils sont tout des thèmes de la vie actuelle. Il est vrai que ces thèmes sont parfois un peu « bateau », mais la façon dont ils sont abordés est originale et recherchée. De plus, tous les problèmes abordés ne sont pas résolus à la fin par une grande réconciliation qui apaise le spectateur et le laisse dans une situation de stabilité. Au contraire, la fin permet de poursuivre le questionnement au-delà du film.

En dernier lieu, les personnages sont très importants. C’est à travers la mère et les deux jumeaux que tout le film se déroule. Ils sont tous très réalistes et font d’émotions subtiles. La situation des personnages peut arriver à tout le monde. Leur manière de jouer est très nuancée et proche de la réalité. Ils ne sont pas du tout stéréotypé. La relation qu’ils entretiennent tous ensemble est loin d’être simple car en effet, les personnages mis en scène ont des motivations qui ne sont pas fort explicites, et qui restent tout au long du film assez complexes.

En conclusion, ce film typiquement belge est très intéressant au niveau de la réflexion. Il fait preuve d’une grande créativité Les personnages présentent un grand réalisme. Et les thèmes abordés sont développés de manière intense. C’est donc un film qui vaut le détour. Pourquoi ne pas avoir un vrai dialogue plutôt que recourir directement à la violence?

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